jeudi 21 novembre 2013

Des vagabonds phosphorescents

Ils Étaient là, dans la pénombre, il faisait presque nuit à vrai dire. À chaque minute, le ciel perdait très distinctement un gros bout de clarté.
Mais, évidemment, ils s’en moquaient, puisqu'ils étaient là, et que leur cas allait tout régler. Hé oui ! Tout. Même les séismes, même les tornades, même la maladie, le chagrin, la mort. Même le bonheur.
Ils allaient régler leur compte à un bon nombre d’idées, de concepts, d’actions, de situations, d’émotions. Ils allaient régler son compte à l’Univers.

Ils Étaient là, dans la pénombre. Il suffisait d’un rien, une brise, un souffle, un quai, une lueur de plus.

Ils Étaient là, dans la pénombre.

Puis la nuit noire.
Le comble.
Rien de rien.

Tout était devenu noir, d’un coup. Le ciel avait fini de perdre des bouts de clarté.

Un vélo passa au loin, avec seulement la lumière de derrière allumée. Ils le haïrent, sans savoir pourquoi. Peut-être parce qu’il y eut un rien, une brise, un souffle, un quai, une lueur de plus. Ils le haïrent et il le comprit, mais évidemment, il était trop tard.

Les vagabonds phosphorescent attrapèrent le cycliste, le rouèrent de coups, se jetèrent sur sa peau, sur sa peur, sur ses os, sur ses mots, ses pensées, ses lueurs. Ils le rouèrent de coups et le laissèrent là.

Puis, ils réfléchirent.

Les vagabonds phosphorescents avaient aperçu une différence dans son sang. Dans le sang du cycliste. Il y avait comme un bruit dans ses globules, qui leur criait : « Debout ! Debout, mes globules ! ». Ce sang parlait. Ce sang était vivant.
Mais ils explosèrent.

Mais ils explosèrent, et irradièrent tout.

Tant pis pour le sang de l’enfant multicolore. Ils réglèrent leur compte aux séismes, aux tornades. Ils réglèrent son compte à la maladie, au chagrin, à la mort.
Ils réglèrent son compte au bonheur.

Ils réglèrent son compte à l’Univers. Au Tout, au Chacun, au Jamais, au Toujours, au Juré qu’on leur avait crachés.

Ils rendirent l’Univers phosphorescent.

Puis, les vagabonds s’en allèrent, un par un, molécule par molécule.


Ils avaient réglé son compte au Néant, en le laissant pour seule puissance dans la Lumière.